Centrales nucléaires : l’atome ne pèse pas dans le mix énergétique

Selon un rapport de l’ONG américaine Global Energy Monitor (GEM), sorti le 4 septembre, le déploiement de nouvelles centrales nucléaires en Europe ne permettra pas d’atteindre les objectifs climatiques. En cause, l’allongement des délais de construction, la hausse des coûts et la concurrence des énergies renouvelables.
L’Accord de Paris de 2015 préconise de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle. Malheureusement, ce seuil pourrait être dépassé dans les trois prochaines années, selon des évaluations scientifiques. Cette accélération est notamment liée au retard pris dans la decarbonation du mix énergétique. Pour rester dans les clous, les gouvernements multiplient les investissements, en particulier dans l’énergie nucléaire. L’atome a bénéficié d’un soutien politique et de financements accrus ces dernières années. Mais ces efforts ne suffiront pas à atteindre les objectifs climatiques.
Le déploiement de nouvelles centrales nucléaires ne permettra pas de decarboner le mix énergétique européen
D’après un rapport de l’ONG américaine Global Energy Monitor (GEM), publié le 4 septembre, le déploiement de nouvelles centrales nucléaires ne permettra pas de decarboner le mix énergétique européen. Pour en arriver à cette conclusion, l’organisation a analysé le Global Nuclear Power Tracker (GNPT), une base de données mondiale qui répertorie toutes les installations nucléaires, en service, en construction, annoncées, annulées ou mises hors service.
Seulement 2 % des centrales nucléaires prévues sont effectivement en construction
L’Union européenne exploite actuellement 157 gigawatts (GW) de capacité nucléaire sur 401 GW de nucléaire opérationnels à travers le monde. Alors que d’autres énergies progressent, la part du nucléaire dans le mix électrique européen est passée de 25 % en 2005 à moins de 20 % en 2024, dont 90 % provient de réacteurs de plus de 35 ans. En vingt ans, le secteur nucléaire européen a perdu 122 GW de capacité prévue suite à des annulations de projets. Seulement 2 % sont effectivement en construction, tandis que 15% ont été mis hors service.
L’éolien et le solaire progressent
À l’inverse, les énergies éolienne et solaire industrielles européennes augmentent sans cesse. Leur capacité en construction ou en pré-construction dépasse de plus de treize fois celle du nucléaire, avec plus de 600 GW prévus. Contrairement au nucléaire, ces ajouts d’énergie éolienne et solaire devraient contribuer considérablement à la décarbonation de l’Europe. Une grande partie de cette capacité renouvelable sera opérationnelle bien avant les nouveaux projets nucléaires, en raison des délais de réalisation plus courts, entre un et quatre ans, contre une décennie ou plus pour le nucléaire. Pour ce qui concerne les autres énergies, le stockage sur batterie devrait passer de 22 GWh en 2024 à environ 120 GWh d’ici 2029, stimulé par la baisse des coûts. L’hydroélectricité par pompage-turbinage, elle, restera un pilier des capacités de stockage d’énergie à grande échelle.
Les projets prennent beaucoup de retard
Selon GEM, le nucléaire recule en Europe parce que les projets sont systématiquement confrontés à des risques élevés de retard, de dépassement des coûts et d’abandon. À titre d’exemple, les projets de réacteurs européens Olkiluoto (Finlande), Flamanville (France) et Hinkley (Royaume-Uni) ont pris des retards de plus de dix ans et connus d’importants dépassements de coûts. Tous reposent sur le réacteur pressurisé européen (EPR), dont la complexité et la particularité n’ont pas permis une mise en œuvre efficace. Plusieurs pays planchent actuellement sur le développement des petits réacteurs nucléaires (SMR). Mais les premiers déploiements n’auront pas lieu avant 2030. En attendant, GEM appelle à une planification systémique et neutre sur le plan technologique et à définir clairement le rôle du nucléaire.