Recrutement : la mutation numérique redistribue les cartes

Recrutement : la mutation numérique redistribue les cartes

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Face à l’évolution des technologies d’information et des comportements, le secteur des ressources humaines effectue lui aussi sa mue. À l’utilisation désormais incontournable des outils numériques s’ajoute une approche davantage tournée vers les attentes des candidats.

Les traditionnels CV, lettres de motivation et entretiens physiques n’ont qu’à bien se tenir ! Avec l’avènement d’internet et des réseaux sociaux, le domaine du recrutement s’est peu à peu transformé pour s’adapter aux nouvelles habitudes des candidats à un emploi. Attention : ce changement n’est pas seulement une simple mise à jour des méthodes en place, mais une véritable mutation de la démarche employeur pour séduire ses futures recrues et fidéliser les talents. Comme les autres services de l’entreprise, les ressources humaines utilisent de plus en plus les outils numériques pour optimiser leur fonctionnement. Fini (ou presque) l’envoi des candidatures par courrier quand un simple email permet de gagner plusieurs jours d’un côté comme de l’autre.

Depuis plusieurs années déjà, le recrutement se décline également en 2.0. Les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, YouTube et Instragram constituent un nouveau terrain de chasse, en particulier ceux dédiés au monde du travail comme LinkedIn et Viadeo. Les marques y soignent leur image pour séduire les profils recherchés. Une fois mis en relation, candidats et employeurs n’hésitent plus à préférer la vidéo au classique entretien d’embauche pour là aussi gagner du temps. Aujourd’hui, l’essor du mobile et de l’intelligence artificielle aidant, le recrutement 3.0 permet de toucher un nombre de personnes toujours plus grand et de manière plus précise. Et l’ère du 4.0 se dessine déjà… « On voit s’inverser l’équilibre employeur-candidat : l’entreprise-employeur doit aller chercher ses futurs employés là où ils sont le plus souvent, c’est à dire derrière leurs écrans, et les séduire en argumentant, faisant preuve d’inventivité et d’originalité, notamment dans les secteurs tendus, où une véritable guerre des talents s’est instaurée, explique Hélène Bauduin, responsable mobilité et recrutement au sein du Groupe EDF. Pour attirer des candidats, les entreprises doivent se « startupiser », recruter en mode agile et décomplexé. »

Gamification, escape games… Le jeu comme outil de recrutement

Parmi les nouvelles techniques des recruteurs, l’entretien vidéo via des applications comme Skype, Whatsapp ou Facebook est désormais entré dans les mœurs. Afin de coller au plus près à leurs besoins, certaines entreprises ont même personnalisé son utilisation. Pour le recrutement de commerciaux, Vente-privée Le Pass propose ainsi aux candidats de répondre à une série de questions filmées, avec 30 secondes de réflexion non-filmées avant chacune d’elle pour laisser un temps de réflexion. « Nous pouvons évaluer en quelques minutes la présentation de la personne, sa manière de parler, sa capacité à argumenter face aux questions posées, explique Olivier Le Floch, le PDG. C’est un vrai gain de temps pour nous, mais aussi pour les candidats qui n’ont pas à se déplacer à Paris pour un premier entretien. » D’autres entreprises se sont intéressées aux goûts des nouvelles générations pour proposer des entretiens sous forme de « gamification » ou d’ « escape games ». Disponible sur Apple Store, Knoch est une application dédiée au recrutement qui met le candidat en situation professionnelle à travers des jeux vidéo comme Wasabi Waiter, Bomba Blitz ou Meta Mage. « En 10 minutes, nous enregistrons des milliers de micro-données comportementales, indique Guy Halfteck, son fondateur. Cela nous permet de cerner le mode de raisonnement du joueur, sa capacité à apprendre de ses erreurs, son sens des priorités, son degré d’empathie et plein d’autres choses. » Le principe est assez similaire avec l’escape game mis en place par la DRH de Groupama. Pour certains de ses entretiens, la société d’assurance réunit 24 personnes par groupe de 6 joueurs, qui doivent résoudre des énigmes et avancer ensemble pour trouver la sortie…

Et le rapport humain dans tout cela ?

Ces nouvelles méthodes de recrutement s’inscrivent dans une démarche de « candidate-driven market », soit l’attention exacerbée que portent les entreprises sur les comportements et attentes des candidats. Pour attirer les talents, en particulier dans les professions très demandées comme les ingénieurs ou développeurs web, les services ressources humaines et cabinets de recrutement redoublent donc de compétitivité et d’ingéniosité. Du 4 mars au 30 mai 2019, EDF a organisé ainsi l’opération Le job de mes rêves, une véritable innovation qui invite les jeunes diplômés à décrire leur emploi idéal sur une plateforme dédiée. Grâce aux interactions sur chaque publication, les participants peuvent recueillir des points qui leur permettent d’être éligibles aux postes à pourvoir. Les recruteurs multiplient leurs efforts en ligne, mais aussi en dehors. En plus d’être présents dans les salons spécialisés, ils n’hésitent plus à mettre en place des partenariats avec les écoles d’enseignement supérieur et même à organiser des journées portes ouvertes ou de « job dating ». Le but : aller à la rencontre des candidats pour augmenter leurs chances de recruter les meilleurs talents.

Cette démarche s’applique également aux personnels déjà en poste. Afin de retenir les talents, les entreprises investissent dans la formation, le bien-être au travail ou encore des services aux salariés (ex. : crèche, salle de sport, flotte de vélos, etc.). « Chez EDF, nous recrutons certes pour un poste, mais surtout pour offrir aux candidats un parcours professionnel où il pourra apprendre, s’enrichir et s’épanouir, affirme Hélène Bauduin. Au-delà d’un bon job et d’opportunités de réaliser des parcours multiples partout dans le Groupe, nous avons mis en place chez EDF des dispositifs permettant aux salariés de combiner un bon équilibre entre vie pro et perso, comme le télétravail, le travail sur site déporté ou encore l’intraprenariat. » Car malgré la profusion d’outils numériques, la relation avec le candidat et le salarié demeure primordiale pour les services de ressources humaines. « La chose importante qui fait notre force, c’est que nous mettons l’humain en première ligne, même si le digital « révolutionne » nos processus, ajoute Hélène Bauduin. S’il y a un secteur où l’humain doit rester au centre du dispositif, c’est bien le recrutement. Le digital, les réseaux sociaux, les algorithmes facilitent la séduction et le « matching » du candidat avec une offre idéale, mais rien ne remplace l’échange et le rapport humain. » Et ça, c’est plutôt rassurant !