Entreprises : répondre aux pénuries de talents par la formation professionnelle

Entreprises : répondre aux pénuries de talents par la formation professionnelle

En France, de nombreux secteurs, de l’automobile à la santé, en passant par la menuiserie et le transport en commun, peinent à recruter de la main d’œuvre, selon les chiffres de Pôle emploi. Pour y remédier, les entreprises n’hésitent pas à ouvrir leur propre CFA. Et des écoles de production, à mi-chemin entre la filière professionnelle et l’alternance, voient le jour.

Va-t-on manquer, en France, d’infirmiers, d’éducateurs spécialisés, ou encore de conducteurs de transports en commun ? D’après Pôle emploi, certains secteurs connaissent des problèmes de recrutement importants, 58 % des recrutements étant jugés « difficiles » selon l’agence (une hausse de + 13 points par rapport à l’an dernier). 

La formation en entreprise comme antidote à la pénurie de talents

L’Hexagone connaît une pénurie de couvreurs, de carrossiers, de pharmaciens, de mécaniciens ou encore de menuisiers, et ce pour des raisons diverses et variées – les recruteurs estiment qu’il n’y a pas assez de candidats (86 %, + 9,1 points par rapport à 2021), et lorsqu’ils se présentent, leur profil n’est souvent pas assez adapté au poste (71 %, – 3,8 points par rapport à 2021)

Pour faire face à la pénurie de talents qui s’installe progressivement sur le marché de l’emploi, certaines entreprises font le choix de former elles-mêmes leurs talents, qu’elles recruteront par la suite en tant que collaborateurs. 

La loi, qui permettait difficilement de créer des diplômes et/ou titres éligibles à l’alternance, a été assouplie en 2018 (Loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel), et simplifie désormais ces démarches administratives. Un bol d’air pour de nombreux entrepreneurs, qui peuvent ouvrir leur propre CFA (centre de formation des apprentis) afin de former des jeunes au sein de leurs locaux.

Certaines entreprises françaises, pionnières en la matière, n’ont pas attendu l’assouplissement de la loi pour jouer la carte de la formation professionnelle. Le groupe EDF, l’un des plus gros pourvoyeurs d’emplois du pays, dispose ainsi de trois Centres de Formation d’Apprentis – deux dédiés aux métiers de l’énergie et un, spécialisé dans les métiers des services énergétiques.

A la clé, un contrat d’alternance dans l’une des entreprises de l’énergéticien – ou de ses partenaires –, et, surtout, un diplôme reconnu par l’État, de bac à bac + 2, dans l’une des 13 formations délivrées par les établissements partenaires (services énergétiques, production, transport, distribution, fonctions support).

« Avec les CFA, EDF propose de formations diplômantes pour recruter ses futurs salariés dans les filières techniques ou dans les métiers des services énergétiques », fait savoir Christophe Carval, directeur exécutif Groupe, en charge des ressources humaines chez EDF. Selon une étude du Ministère du Travail (2021), les filières énergie, chimie et métallurgie sont d’ailleurs les filières avec le plus haut taux d’insertion d’apprentis (69% de jeunes insérés au bout de 6 mois en 2020).

« Nous voulons rapprocher les jeunes du monde du travail, et, donc, développer leur réseau professionnel. Nous sommes aussi gagnants, car cela permet à nos concessionnaires de monter en compétences », fait écho Arnaud Sautier, directeur de la formation du réseau France chez Renault. Le constructeur automobile, lui aussi, devrait lancer des formations, à Mâcon (Saône-et-Loire), à partir du mois de septembre.

Les écoles de production, un modèle hybride

A côté des CFA ouverts par ces entreprises, les écoles de production voient le jour, en France – une sorte de troisième voie, à mi-chemin entre le lycée professionnel et l’alternance, qui lutte contre le chômage des jeunes (15,9 %, à la baisse) et alimente les secteurs qui recrutent. 

Industrie, automobile, bâtiment, restauration… Le réseau compte 41 établissements privés d’enseignement technique implantés sur tout le territoire ; reconnus par l’État, ils mettent l’accent sur le travail en ateliers et la réalisation de commandes concrètes à destination des entreprises. Une aubaine, non seulement, pour ces dernières, mais également pour les jeunes, encadrés et, surtout, responsabilisés très tôt.

L’État, qui compte doubler le nombre d’écoles de production, propose aussi une préparation opérationnelle à l’emploi (POE), « une réponse rapide et sur-mesure aux métiers en tension » selon le ministère du Travail. Lorsqu’un besoin de recrutement apparaît, dans une entreprise – elle doit en faire la demande à Pôle emploi –, la POE est mise en œuvre dans un cadre individuel, et co-construite par la société et l’agence publique. 

D’une durée de 400 heures maximum, elle prend en charge les potentiels futurs collaborateurs et leur propose des immersions en entreprise. Et, au bout, si le niveau requis pour occuper le poste est atteint, un contrat (CDI ou CDD de 12 mois minimum). Ouverte à tous les demandeurs d’emploi, la POE est dotée d’un budget d’1 milliard d’euros, au titre du Plan d’investissement dans les compétences. Et vise à toucher quelque 65 000 personnes par an en moyenne.