Permis de conduire : faute d’instructeurs, la Loi Macron cale

Permis de conduire : faute d’instructeurs, la Loi Macron cale

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Associée à une série de textes destinés à porter la croissance, la réforme du permis de conduire a été initiée en 2015. Destinée à lutter contre un allongement considérable des délais de présentation à l’examen de conduite, et une augmentation des frais pour les candidats, elle peine à porter ses fruits.

Plus de trois mois d’attente, c’était en 2013 le délai moyen pour repasser son permis de conduire après un premier échec dans les régions les plus peuplées de France (PACA, Rhône-Alpes et Ile de France). Et dans certaines communes, ces candidats malheureux devaient parfois attendre jusqu’à cinq mois pour retenter leur chance. Conséquence supplémentaire pour les recalés : pour maintenir leur niveau dans l’attente d’un nouvel examen, ils devaient dépenser en moyenne 200 euros chaque mois.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite ‘Loi Macron’ comportait un volet destiné à mettre un terme à ces disparités régionales et à faciliter l’accès à la conduite, par ailleurs point d’étape souvent obligatoire pour obtenir un emploi.

Les réservistes mobilisés

Les pouvoirs publics ont alors largement communiqué sur des mesures phares, telles que la mobilisation de policiers et gendarmes réservistes pour s’occuper des épreuves du code, la réduction de la durée de l’épreuve de conduite à 32 minutes (contre 35 initialement), et une hausse des effectifs d’examinateurs en organisant un concours exceptionnel en Ile de France pour recruter 25 agents de plus auquel s’ajoutaient des promotions supplémentaires les années suivantes. De manière à libérer davantage les examinateurs, les épreuves du code ont été confiées à des opérateurs agréés par l’Etat, dont La Poste et SGS.
La réforme du permis de conduire tend enfin à favoriser la conduite accompagnée, puisqu’elle permet de réduire les coûts pour les candidats (d’environ 500 euros). Cette loi autorise désormais la conduite accompagnée dès l’âge de 15 ans.

Sessions annulées

Deux ans après ces annonces, et malgré des recrutements d’examinateurs supplémentaires, les candidats de plusieurs départements sont toujours confrontés à des délais largement supérieurs à deux mois. En Seine Maritime, ce sont normalement 30 000 personnes qui passent chaque année leur permis, sous le contrôle d’une trentaine d’examinateurs. Faute d’une disponibilité suffisante, les délais sont devenus très élastiques au second trimestre, pour atteindre trois à quatre mois pour une représentation après un premier échec. Et à l’approche de l’été, le nombre d’étudiants souhaitant passer l’examen de conduite est venu étirer davantage ces délais.
En Mayenne, l’été s’est révélé compliqué pour les candidats qui ont vu leur attente se prolonger pour repasser l’épreuve. Certaines sessions ont même été annulées à la dernière minute. A chaque fois, des problèmes passagers sont invoqués par les autorités.
Mais ils illustrent le manque d’effet des mesures proposées par la Loi Macron, avec en bout de chaine des candidats condamnés à attendre une date hypothétique en vidant leur porte-monnaie.

Economiquement, le lien entre permis de conduire et croissance fait sens

En 2014, déjà, le think tank d’obédience libérale Génération Libre avait listé les écueils du permis de conduire français. Revenant en moyenne 1600 euros par personne, avec des heures de conduite coûtant jusqu’à deux fois plus chères que celles de nos voisins (notamment au Royaume-Uni), le permis est depuis longtemps en France, un luxe.

Les derniers chiffres officiels étaient à ce titre patents : alors que 1,5 millions de personnes passent le permis de conduire chaque année, 4 millions attendent encore une place d’examens, et 800 000 à 2,5 millions de conducteurs sont à ce jour sans permis. Une gageure quand on sait que d’après l’étude d’impact de Loi Macron, la détention du permis de conduire constitue un critère de recrutement pour 65 % des employeurs. Alors que le chômage touche principalement les jeunes (24% pour les moins de 25 ans) et que le coût de ce dernier se chiffre en plusieurs dizaines de milliards d’euros, mener la réforme du permis de conduire jusqu’au bout soulagerait indubitablement notre économie.

« Le permis de conduire est un élément essentiel de l’insertion sociale et professionnelle, en particulier pour les jeunes », soulignait ainsi le ministère de l’Intérieur. Il est donc urgent que les imperfections de la Loi Macron soient corrigées, pour que les inégalités territoriales qu’elle prétendait supprimer ne réapparaissent pas